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côté de moi ; nous étions toutes les deux profondément endormies, lorsque ma mère, tenant le bracelet et une lanterne sourde, entra doucement dans ma chambre. Quelles furent sa frayeur et sa surprise en trouvant la chambre remplie d’une épaisse fumée, et voyant mes rideaux et mon lit tout en flammes !… Je dormois du plus profond sommeil, le feu étoit près de m’atteindre, dix minutes plus tard j’étois perdue !… On m’arracha de mon lit ; on me porta dans une autre chambre ; on crie, on me questionne, on me gronde, toute la maison accourt ; je n’oublierai jamais cet effrayant tumulte !… J’avouai qu’ayant voulu lire, dans mon lit, les paroles de l’opéra gascon, Alcimadure, que l’on donnoit alors, dans l’espoir que je les comprendrois mieux en les entendant chanter, je m’étois endormie en faisant cette lecture, et sans avoir éteint la lumière. Pour me punir, on me fit attendre le bracelet que je ne pus obtenir que huit jours après cet événement.

Vers ce temps parut le mauvais et pernicieux livre de M. Helvétius[1], intitulé de

  1. M. Helvétius, né en 1715, mourut en 1771.
    (Note de l’éditeur.)