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« Je trouvais, — dit-il, — chez Gleyre, Renoir, Bazille... Comme nous dessinions d’après un modèle, d’ailleurs superbe, Gleyre critiqua mon travail :

— Ce n’est pas mal, mais le sein est lourd, l’épaule trop puissante, et le pied excessif.

— Je ne peux dessiner que ce que je vois, — répliquai-je timidement.

— Praxitèle empruntait les meilleurs éléments de cent modèles imparfaits pour créer un chef-d’œuvre, — riposta sèchement Gleyre. — Quand on fait quelque chose, il faut penser à l’antique !

Le soir même, je pris à part Sisley, Renoir et Bazille :

— Filons d’ici, leur dis-je. L’endroit est malsain : on y manque de sincérité.

Nous partimes après quinze jours de leçons de cette force... Et bien nous en prit, car je ne sache pas qu’aucun des forts en thème de l’atelier ait fait rien qui vaille.

Sisley parti avec ses amis devint comme eux un paysagiste, malgré quelques représentations de la figure humaine par des portraits et des scènes d’intérieur et de plein air où des personnages passent et se groupent. Ainsi, la Leçon, un incontestable chef-d’œuvre : deux enfants, assis, accoudés à une table ronde, qui étudient.

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