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embarrassé d’une telle étude, alors que le français était, je ne dis pas relégué au second plan, mais absolument sacrifié dans ces établissements où l’on apprenait à parler et à composer en latin. « Vous écrivez le français comme si c’était votre langue maternelle, » disait un jour à Rollin auteur de l’Histoire ancienne le chancelier Daguesseau justement étonné. On n’enseignait donc pas l’orthographe dans les collèges sous l’ancien régime ; le mot ne se trouve même pas, chose digne de remarque, dans un certain nombre de dictionnaires français-latins à l’usage des classes, publiés en 1636 et en 1675, alors que le lexique latin-français correspondant mentionne orthographia, la manière et science d’escrire chacun mot par les lettres[1]. Des dictionnaires justement estimés alors, comme ceux de Danet, de Richelet, de Joubert, écrivent le mot orthographe sans h après le t, et l’auteur d’un Traité d’orthographe écrit to jusqu’à la page 170 et tho dans la dernière partie de son livre[2]. Un écolier qui se servirait aujourd’hui de ces livres classiques faits pour ses camarades du temps jadis y apprendrait l’art de faire une infinité de fautes que son étourderie n’avait pas prévues, il serait perdu sans ressource. Mais au xviie siècle, pour devenir maître ès arts ou pour obtenir les grades de bachelier en droit ou en théologie, les jeunes gens n’avaient pas besoin de savoir écrire une ligne de français ; pour les rendre meilleurs latinistes, on allait jusqu’à leur défendre de parler français en récréation !

Mais avant d’entrer au collège pour y étudier les

  1. Dictionariolum latino-græco-gallicum, F. Morel, Paris, 1636.
  2. Dictionnaire de Faulcon, au mot Orthographe, le Traité est de Jacquier.