Page:Gazier - Histoire générale du mouvement janséniste, depuis ses origines jusqu’à nos jours, tome 1.djvu/269

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
257
chapitre xiv

au jugement du seul tribunal infaillible, celui de l’Église universelle assemblée conciliairement. Une semblable démarche serait aujourd’hui impossible ; en 1717 elle a pu contrister le souverain pontife et le résoudre même quelque temps à retirer la Bulle ainsi attaquée ; elle n’avait rien de révolutionnaire, parce que c’était l’exercice d’un droit imprescriptible reconnu par les lois de l’Église. On avait eu recours à l’appel au futur concile lors des démêlés de Philippe le Bel avec Boniface VIII. Il était impossible à Clément XI de faire ce que ferait aujourd’hui son successeur, de répondre dans les vingt-quatre heures par une sentence d’excommunication, majeure et par une déposition des évêques coupables. La canonicité de l’appel, qui était le contraire d’un acte schismatique, était absolue, puisque les appelants protestaient de leur profond respect pour l’autorité pontificale et de l’union indissoluble qu’ils conservaient avec elle. Jansénius n’aurait pas revendiqué l’exercice de ce droit. Parce qu’il croyait à l’infaillibilité personnelle des papes ; c’est une nouvelle preuve que les quatre appelants n’étaient point jansénistes ; ils étaient simplement augustiniens et gallicans.

Ce fut le 5 mars 1717, dans la grande salle de la Sorbonne et en présence de la Faculté de théologie tout entière, que les quatre évêques notifièrent officiellement leur appel. L’évêque de Mirepoix, qui était le plus ancien, prit la parole au nom de tous, et il exposa les raisons qui avaient déterminé ses confrères et lui à recourir à la voie de l’appel ; ensuite l’évêque de Senez donna lecture de l’acte qui avait été signé quatre jours auparavant chez l’évêque de Montpellier. La lecture de cet acte fut accueillie par des cris de joie ; on alla promptement aux voix, et quatre-vingt-dix-