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chapitre x

Cyran prisonnier à Vincennes, et, si le public proprement dit l’ignorait, les initiés le savaient bien. Et parmi les approbateurs, qui le savaient mieux encore, se trouvait Grenet, le supérieur de Port-Royal. C’était hardi de publier ainsi, en 1670, un grand ouvrage de celui que les Jésuites considéraient comme leur plus grand ennemi ; il est vrai qu’il était muni d’un privilège du roi octroyé sans doute à M. d’Andilly sous le nom du sieur de Lorme. L’ouvrage est d’ailleurs absolument irrépréhensible, et il est bien curieux ; il a pu servir récemment à prouver d’une façon péremptoire que Port-Royal, formé par Saint-Cyran, avait pour la Vierge un culte tout particulier[1] ; saint Bernard excepté, on ne connait pas de plus grand dévot à Marie que le prisonnier de Vincennes. On y voit aussi, non sans étonnement, Saint-Cyran exalter le jésuite saint François-Xavier, l’apôtre des Indes, presque à l’égal de saint Paul, l’apôtre des Gentils.

Les Considérations sur les fêtes étaient anonymes ; il n’en fut pas de même d’un autre ouvrage du même Saint-Cyran qui fut imprimé avec privilège chez Pierre Le Petit, imprimeur du roi, le 5 décembre 1671. C’est un très beau volume de 374 pages, intitulé Instructions chrétiennes tirées par M. Arnauld d’Andilly des deux volumes de Lettres de Mre Jean Du Verger de Haurane (sic), abbé de Saint-Cyran. Le privilège, daté du 24 juin 1671, est octroyé au sieur Arnauld d’Andilly, conseiller de Sa Majesté en ses conseils d’État et privé. Les Pensées de Pascal, parues l’année précédente, n’avaient pas été publiées, il s’en faut de beaucoup, avec un si grand luxe. On dirait que c’était

  1. V. Flachaire. La Dévotion à la Vierge dans la Littérature Catholique au commencement du xviie siècle.