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histoire du mouvement janséniste

nière des religieuses de Port-Royal. Filles spirituelles d’Angélique Arnauld, issues souvent de familles d’avocats ou de magistrats, elles étaient essentiellement formalistes, procédurières, avocassières, voire processives ; c’est une des rares faiblesses de ces grandes âmes, de même que la croyance aux songes prophétiques, la disposition à voir partout des miracles, et la tendance à trouver dans les saints livres ouverts au hasard des textes se rapportant d’une façon précise à leur situation présente. On peut voir tout cela dans les chapitres XXXVI et XXXVII de l’Histoire des persécutions, où se trouve décrite la « cérémonie » du 11e jour d’août. « La comnunauté, dit le narrateur malheureusement anonyme, s’assembla capitulairement après la grand’messe… Comme nous étions rangées chacune en notre rang dans le chapitre, et une table au milieu, la Mère Agnès ouvrit le livre des saints évangiles qu’on devait mettre sur la table, et sur lequel nous devions jurer notre profession de foi, dans le dessein de voir ce que la Providence nous y ferait rencontrer, et à l’ouverture, sans autre choix, elle trouva le XVIe et le XVIIe chapitres de saint Jean, où on lut d’abord ces paroles dans la première page : Amen dico vobis, etc., c’est-à-dire : En vérité, en vérité je vous le dis ; vous pleurerez et vous gémirez, vous autres, et le monde sera dans la joie… Je ne vous dis point que je prierai mon Père pour vous, car mon Père vous aime lui-même parce que vous m’avez aimé… Le temps va venir, et il est déjà venu, que vous serez dispersés chacun de son côté. Et ce qui suit : Vous aurez des afflictions dans le monde, mais ayez confiance, j’ai vaincu le monde. Et dans la deuxième page, la prière que Jésus-Christ fait à son Père dans le XVIIe chapitre afin qu’il unisse en lui