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Mais dans cet ensemble, dont presque toutes les parties, d’ailleurs, prises isolément, méritent l’estime et la sympathie, il est un pur bijou de sculpture incrusté après coup, quoique d’une époque antérieure, comme, sur la robe d’une Sainte Foy à Conques, l’un de ces précieux camées dont la piété des fidèles se plaisait à embellir l’image vénérée ; je veux parler de la petite Vierge romane et de l’archivolte qui l’encadre au-dessus de la porte de droite. Tous les historiens de la cathédrale de Reims[1] ont noté le caractère relativement archaïque de ce groupe de sculptures, constaté qu’elles devaient se rattacher à une époque plus ancienne que celle de la construction du transept, et de la porte même où elles sont placées.

Mais je demande la permission de me référer exclusivement à M. Louis Demaison — que la sûreté de son information, la parfaite connaissance qu’il a de tous les textes, jointe à la rigueur critique avec laquelle il sait les manier, placent tout à fait hors de pair — et de citer ici textuellement sa description et son jugement ; ce témoignage autorisé formera le meilleur préambule à l’étude que je veux tenter et, résumant ce qui est actuellement acquis sur la question, sera la base solide sur laquelle j’essaierai d’édifier une hypothèse :

La cathédrale, ainsi que nous l’avons démontré, dit M. Demaison[2], a été commencée en 1211. Il faut remarquer que les constructeurs de cette époque ont laissé subsister un élément d’une date visiblement antérieure : cette petite baie si curieuse, d’un aspect roman, qui s’ouvre sur le croisillon Nord du transept, à droite de la porte principale, et qui mettait jadis l’église en communication avec les bâtiments du cloître. Longtemps cachée par un mur élevé à la suite des démolitions opérées durant la période révolutionnaire, elle vient d’être dégagée récemment…

L’archivolte en plein cintre qui la surmonte est décorée de statuettes d’anges d’une grande finesse d’exécution ; les pieds-droits offrent, de face, de charmants rinceaux, et sur leurs faces latérales, des figures de clercs occupés à des fonctions liturgiques. On voit d’un côté un personnage, évêque ou abbé, tenant une crosse à la main, près d’un autre lisant dans un livre qu’un clerc lui présente ; en regard, c’est encore un clerc qui tient un seau à eau bénite dans lequel l’offi-

  1. Gilbert, Description de la cathédrale de Reims. Paris, 1825, in-8o ; — Viollet-le-Duc, Dictionnaire d’architecture, t. II, p. 320 ; — Chanoine Cerf, Histoire et description de la cathédrale de Reims, Reims, in-8o, 1861 ; — abbé Tourneur, Description de la cathédrale de Reims. Reims, édition de 1878, in-12o ; — France artistique et monumentale, t. I, p. 2 : La cathédrale de Reims (par Louis Gonse) ; — Gosset, La cathédrale de Reims. Reims, 1894, in-4o ; — Bazin, Reims, ses monuments. Reims, 1900, in-4o.
  2. J’emprunte cette citation à la brochure : La cathédrale de Reims, ses époques de construction, parue à Caen, chez Delesques, en 1902, in-8o.