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présenter dignement le développement complet de notre grand art national après l’architecture. Néanmoins elle n’était pas sans offrir quelque intérêt, au point de vue d’abord de la présentation et de l’agrément de l’Exposition. Elle contribuait à meubler et à animer les salles du pavillon de Marsan, à leur éviter l’aspect monotone de nos musées, où les départements trop strictement délimités ne permettent encore que rarement ces réunions d’œuvres de techniques différentes mais d’esprit identique, où les tableaux alignés implacablement le long d’un mur, les statues entassées et se coudoyant dans des salles trop étroites arrivent à ressembler à des fleurs séchées, scientifiquement rangées dans un herbier, ou à des fossiles dans une vitrine. Il y avait, dans le rapprochement en un même local, de ces œuvres de peinture et de sculpture, de tapisserie et de miniature, voire même de quelques ivoires et de quelques émaux, une indication au moins pour de futures expositions soit temporaires, soit permanentes, qui permettraient d’apercevoir l’art d’une époque dans son unité et dans sa vie.

Cette tentative, si modeste fût-elle et incomplète, n’allait pas aussi sans offrir un intérêt scientifique, en facilitant les comparaisons, en montrant le parallélisme du développement des différents arts, l’avance ou le retard de l’un sur l’autre. Il est évident chez nous, par exemple, au xiiie et même encore au xive siècle, que l’art des imagiers est plus développé, atteint des résultats plus complets, plus harmonieux et plus parfaits que celui des peintres et des enlumineurs et que, partant, il doit l’influencer et le guider.

De plus, dans cet art de sculpture, peut-être uniquement du reste par le fait qu’il est un peu mieux connu, ayant été scientifiquement étudié depuis un peu plus longtemps, ne saisissons-nous pas à peu près dès maintenant ce que l’on cherche précisément à apercevoir dans celui de peinture, c’est-à-dire un enchaînement continu de traditions et d’écoles, une suite presque ininterrompue d’œuvres dépendant les unes des autres ? Ces œuvres aussi, outre qu’elles sont plus nombreuses, qu’elles ont un peu mieux résisté au temps et aux causes de destruction de toute sorte, ne nous offrent-elles pas, par leur caractère même, des témoignages en quelque sorte plus certains ? Moins sujettes aux dégradations ou aux restaurations plus terribles encore qui altèrent si complètement la signification réelle des autres, elles ont généralement moins voyagé ; on les retrouve plus sûrement dans le milieu même pour lequel elles ont été créées. On est plus sûr, enfin, de pouvoir affirme entre elles et ce