L’Éternel Féminin
Sur la terre éblouie ont salué l’aurore !
Beauté ! présent fatal que des cris furieux
Ont maudit tant de fois et maudiront encore !
Beauté ! clarté céleste, astre aux rayons vainqueurs
Qui depuis six mille ans illumines le monde !
Beauté ! feu de l’enfer qui tortures les cœurs
Sous ta brûlure atroce, immortelle et profonde !
Beauté ! dictâme pur qui des bleus paradis
À nos ardents désirs ouvres la porte auguste !
Beauté ! poison subtil et lent, tel que jadis
N’en prépara jamais la sauvage Locuste !
Beauté ! déesse bonne aux doux yeux carressants
Qui pour nous consoler nous prends sur ta poitrine !
Beauté ! furie avide aux deux bras menaçants
Qui nous déchires tous de ta dent vipérine !
Toi qui portes la vie et qui donnes la mort,
Chimère énigmatique, ô monstre bicéphale
Qui poursuis en riant, sans émoi, sans remord,
Dans le sang des humains ta marche triomphale !
Parle ! qui donc es-tu ? pour que nous te gardions
Malgré tes cruautés un amour indicible,
Ô, Beauté ! qui reçois nos adorations
Comme un sphinx de granit fièrement impassible !