foudroyant et un jeu furieux), son valet de chambre lui remit une carte : c’était celle de Prosper.
« Prosper ! s’écria Sterny, qu’il entre, faites entrer…
— Mais, monsieur le marquis… je lui ai dit que vous étiez sorti.
— Sorti ! s’écria Sterny furieux ; d’où vous vient cette impertinence envers mes amis ? qui vous a dit de dire que j’étais sorti ?…
— Mais, monsieur le marquis… j’ai cru… »
Sterny était furieux.
« Sot, animal, s’écria-t-il.
— Mais ce monsieur doit être à peine au bas de l’escalier.
— Allez donc le chercher, priez-le de remonter… allez donc… allez donc… »
À peine le domestique fut-il parti, que Sterny s’aperçut de son emportement. En effet, ses mains tremblaient, et il se sentit comme suffoqué. Il eut le temps de se remettre pendant que le valet de chambre courait après Prosper et le forçait, pour ainsi dire, à remonter, de façon que Léonce put l’aborder avec un calme parfait.
« Pardon, mon cher Prosper, lui dit Sterny, si je vous ai fait remonter ; mais j’ai voulu que vous sachiez que si l’on vous a refusé ma porte, ce n’est pas d’après mes ordres.
— Ah ! monsieur le marquis, c’est moi qui suis fâché de vous avoir dérangé.
— Vous m’eussiez dérangé, Prosper, que je vous l’aurais dit sans façon ; mais peut-être en vous voyant refuser ma porte vous auriez pu croire que je ne voulais pas vous recevoir, et c’est ce qui n’est pas. » Puis il ajouta en riant :
« Nous ne sommes pas si impertinents qu’on veut bien le dire, que nous le paraissons, grâce à messieurs nos domestiques ; mais asseyez-vous donc, Prosper.
— Merci, monsieur le marquis : c’est un peu ma faute, je n’ai pas beaucoup insisté, je suis avec ma femme en visites de noce, elle m’attend en voiture avec ma belle-mère et Lise, et il faut que j’aie fini à temps. Nous avons rendez-vous à une heure au chemin de fer de Saint-Germain où nous faisons une partie.
— Ah ! dit Sterny, ces dames sont en bas… elles auraient été bien aimables de me faire l’honneur de monter chez moi.
— Ah ! monsieur le marquis, » fit Prosper.
Cette exclamation voulait dire à la fois : Elles n’eussent pas osé,