« C’est vrai, monsieur Tirlot, vous aviez oublié ma Lise ! »
M. Laloine, ému, vint se mêler à ces embrassements et tendit la main à Léonce en lui disant du fond du cœur :
« Merci, monsieur le marquis, merci ! merci ! »
Puis la mère le remercia, et on le félicita de tous côtés. Cela fit un moment de brouhaha, où tout le monde quitta sa place, tandis que Gobillou criait :
« Au salon ! au salon ! Il y a déjà du monde ! »
Léonce offrit son bras à Lise. Elle le prit ; mais il sentit que sa main tremblait.
Elle était confuse, embarrassée ; mais elle n’était ni triste ni contrariée.
« M’en voulez-vous aussi de mon couplet ? lui dit Léonce.
— Oh ! non, dit-elle doucement ; cela a fait plaisir à mon père et à maman.
— Et à vous ?
— Moi… Je le trouve très-joli, » dit-elle en baissant les yeux.
Et elle se dégagea doucement pour aller à la rencontre de quelques-unes de ses jeunes amies qui étaient dans le salon, que M. et Mme Laloine avaient déjà accueillies, et à qui ils avaient déjà rendu compte de la raison des applaudissements furieux qui venaient d’ébranler le Cadran-Bleu.
« Est-ce vrai ? disent les jeunes filles à Lise en l’entraînant, est-ce vrai que le beau marquis a fait un couplet pour toi ? »
Si ceci eut été dit d’un ton d’affection, Lise eût peut-être nié ; mais on fit sonner le beau marquis d’un ton si envieux, qu’elle répondit avec affectation :
« Oui, c’est vrai.
— Il paraît que tu as fait sa conquête ? dit une fort laide.
— Et sans doute il a fait la tienne ?
— Qui sait ? dit Lise qui trouvait ses bonnes amies très-impertinentes.
— Et d’abord, dit une autre, je vais me faire inviter pour toute la soirée, pour pouvoir le refuser.
— Ah ! ce n’est pas la peine, fit la laide ; ces gants jaunes, ça ne danse pas.
— Ça danse, mesdemoiselles, » dit Sterny, qui s’était doucement approché en longeant un groupe d’hommes ; et il offrit la main à Lise, en lui disant avec un respect profond :