Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 4.djvu/53

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE LION AMOUREUX
par frédéric soulié
1845

ce que c’est qu’un lion a paris
PRÉFACE

Le nom de lion, appliqué à une partie de la jeunesse française, s’est tellement vulgarisé, que je crois inutile d’entrer dans de longues explications pour le faire adopter à mes lecteurs comme signifiant autre chose que l’hôte terrible des forêts, ou l’esclave obéissant de M. Van Amburgh.

Mais quelle est cette autre chose ? On en a bien en général une idée vague et qui suffit à la conversation ; on sait que la race à laquelle le lion appartient a toujours vécu en France sous divers noms ; ainsi le lion s’est appelé autrefois raffiné, muguet, homme à bonnes fortunes, roué ; plus tard, muscadin, incroyable, merveilleux, et dernièrement enfin, dandy et fashionable ; aujourd’hui c’est lion qu’on le nomme.

Pourquoi ?

Est-ce parce qu’il est le roi de cette parcelle de la société qu’on appelle le monde ? Est-ce parce qu’il prend les quatre parts de la proie que d’autres l’ont aidé à saisir ?

Je ne puis vous le dire ; mais je vais tâcher de vous esquisser sa physionomie, et puis vous devinerez, si vous pouvez.

Le lion est en général un beau garçon qui a passé de l’état d’enfant à l’état d’homme, la prétention d’être un jeune homme étant abandonnée depuis longtemps aux hommes de quarante à cinquante ans ; car, de nos jours, l’état de jeune homme est presque aussi méprisé que celui de vieillard.

Or le lion, n’ayant jamais été jeune homme, n’a presque jamais fait aucune des sottises jeunes qui partent du cœur, quoiqu’il aime le jeu, les femmes et le vin, comme disent les refrains du temps de l’Empire,