Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 4.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

carré ou au cube de la même figure géométrique. Ils compliquaient donc l’ensemble sans le troubler, le complétaient sans le charger, La géométrie est une harmonie. Quelques beaux hôtels faisaient aussi çà et là de magnifiques saillies sur les greniers pittoresques de la rive gauche ; le logis de Nevers, le logis de Rome, le logis de Reims, qui ont disparu ; l’hôtel de Cluny, qui subsiste encore pour la consolation de l’artiste, et dont on a si bêtement découronné la tour il y a quelques années. Près de Cluny, ce palais romain, à belles arches cintrées, c’étaient les Thermes de Julien. Il y avait aussi force abbayes d’une beauté plus dévote, d’une grandeur plus grave que les hôtels, mais non moins belles, non moins grandes. Celles qui éveillaient d’abord l’œil, c’étaient les Bernardins avec leurs trois clochers ; Sainte-Geneviève, dont la tour carrée, qui existe encore, fait tant regretter le reste ; la Sorbonne, moitié collège, moitié monastère, dont il survit une si admirable nef ; le beau cloître quadrilatéral des Mathurins ; son voisin le cloître de Saint-Benoît, dans les murs duquel on a eu le temps de bâcler un théâtre entre la septième et la huitième édition de ce livre ; les Cordeliers avec leurs trois énormes pignons juxtaposés ; les Augustins, dont la gracieuse aiguille faisait, après la tour de Nesle, la deuxième dentelure de ce côté de Paris, à partir de l’occident. Les collèges, qui sont en effet l’anneau intermédiaire du cloître au monde, tenaient le milieu dans la série monumentale entre les hôtels et les abbayes, avec une sévérité pleine d’élégance, une sculpture moins évaporée que les palais, une architecture moins sérieuse que les couvents. Il ne reste malheureusement presque rien de ces monuments où l’art gothique entrecoupait avec tant de précision la richesse et l’économie. Les églises (et elles étaient nombreuses et splendides dans l’Université ; et elles s’échelonnaient là aussi dans tous les âges de l’architecture, depuis les pleins cintres de Saint-Julien jusqu’aux ogives de Saint-Séverin), les églises dominaient le tout ; et, comme une harmonie de plus dans cette masse d’harmonies, elles perçaient à chaque instant la découpure multiple des pignons de flèches tailladées, de clochers à jour, d’aiguilles déliées dont la ligne n’était aussi qu’une magnifique exagération de l’angle aigu des toits.

Le sol de l’Université était montueux. La montagne Sainte-Geneviève y faisait au sud-est une ampoule énorme ; et c’était une chose à voir du haut de Notre-Dame que cette foule de rues étroites et tortues (aujourd’hui le pays latin), ces grappes de maisons qui, répandues en tout sens du sommet de cette éminence, se précipitaient en désordre et presque