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« Réveillez-vous, belle endormie, pourrait-on dire à la province ; parlez, agissez. Cela vous déplaît que la poste vous apporte vos opinions toutes faites. Eh bien ! faites-les vous-même, et renvoyez-les au besoin au maître d’école dont vous êtes lasse. Il faudra bien qu’il vous écoute quand vous aurez raison. » ;

Que la province s’affirme, et qu’elle imprime, si elle veut être lue à son tour, après avoir tant lu. Qu’elle se donne des organes à elle, ou mieux, qu’elle prenne plus au sérieux ceux qu’elle a déjà, et qu’elle les rende importants par un concours énergique et réfléchi. Qu’elle fasse aussi ses livres, et ses brochures, puisque la mode y est. Il est vrai que les auteurs n’y trouvent pas actuellement d’éditeurs, vu que les éditeurs n’y trouveraient pas d’acheteurs ; et c’est un cercle vicieux dans lequel on pourrait tourner longtemps si l’on ne prend le parti de le briser par un commencement. Mais il faut bien se persuader que c’est seulement ainsi qu’on rétablira l’équilibre, et c’est en agissant résolument sur le centre, et non en s’isolant de lui dans une hostilité jalouse dont il ne s’inquiétera jamais, parce qu’elle est impuissante. Pour décentraliser, en un mot, bien loin de restreindre les rapports avec le centre, il faut les multiplier au contraire, en les rendant actifs, de passifs qu’ils ont été jusqu’à présent. Paris restera toujours ; — à quoi bon se le dissimuler ? — le grand marché intellectuel du pays ; mais il n’y a pas que les acheteurs qui aillent à un marché, il y a aussi des vendeurs. Seulement pour vendre, il faut avoir produit.

jean macé.