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La Parisienne est-elle belle ? comment est-elle belle ? l’est-elle longtemps ?

On répond par un conte de fée.

la fée bleue.

Un jour la fée bleue descendit sur la terre dans l’intention courtoise de distribuer à toutes ses filles, les habitantes des divers pays, les trésors de faveurs qu’elle portait avec elle.

Son nain amarante sonna du cor, et aussitôt une jeune femme de chaque nation se présenta au pied du trône de la fée bleue. Toutes ces unités finirent, on l’imagine, par former une foule assez considérable. Ceci se passait longtemps avant la révolution de juillet 1830. La bonne fée bleue dit à toutes ses amies :

« Je désire qu’aucune de vous n’ait à se plaindre du don que je vais lui faire. Il n’est pas en mon pouvoir de vous donner à chacune la même chose ; mais une telle uniformité dans mes largesses n’en ôterait-elle pas tout le mérite ? »

Comme le temps est précieux aux fées, elles parlent peu. La fée bleue borna là son discours, et commença la distribution de ses présents. Personne n’en parut fâché.

Elle donna à la jeune femme qui représentait toutes les Castilles des cheveux si noirs et si longs, qu’elle pouvait s’en faire une mantille.

À l’Italienne, elle donna des yeux vifs et ardents comme une éruption du Vésuve au milieu de la nuit ;

À la Turque, un embonpoint rond comme la lune et doux comme la plume de l’eider ;

À l’Anglaise, une auréole boréale pour se teindre les joues, les lèvres et les épaules ;

À une Allemande, des dents comme elle en avait elle-même et, ce qui ne vaut pas mieux que de belles dents, mais qui a son prix, un cœur sensible et profondément disposé à aimer ;

À une Russe, la distinction d’une reine.