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Les pendules elles-mêmes, et il y en a sur chaque cheminée, ont la majesté imposante et pesante des meubles. Trois hommes forts ne soulèveraient pas la plus frêle. Au milieu de ces monuments compliqués on cherche avec curiosité le cadran, et quand on l’a trouvé on regarde à sa montre, tant il semble impossible que ces blocs servent à indiquer l’heure.

Par exemple, ce qui est digne de tout éloge, c’est la façon dont sont distribués les buffets. J’en ai compté quatre, ce me semble, et tous servis à profusion. Mon mari croyait reconnaître dans l’un des maîtres-d’hôtel son tambour de la garde nationale, — quelle plaisanterie !

« Je t’assure que c’est lui, me disait Paul, je reconnais ses gants. »

Le fait est qu’ils ont des gants uniques ! Je ne me plaindrais pas qu’ils soient trop longs, ces gants, si le bout pendant d’un des doigts n’avait trempé dans le bouillon qu’on me présentait. J’ai offert immédiatement la tasse à un diplomate suédois qui était à côté de moi. Pourquoi ce monsieur était-il diplomate et Suédois ? — Je ne sais ; il avait des yeux bleus, des moustaches vertes, et autour du cou un cordon jaune citron… ça ne peut être qu’un Suédois. Peut-être cependant me suis-je trompée.

En somme, ma bonne chérie, ces fêtes officielles sont extrêmement curieuses et amusantes, et il est indispensable d’y aller de temps en temps.

Mon mari me disait en montant en voiture : « Tu sais, ma chère, il faut au moins deux fois par an manger la bisque d’écrevisse dans un restaurant trop doré, pour sentir tout le prix d’un petit dîner chez soi. »

Je t’embrasse sur les deux joues : Ta Louise.
Pour copie. gustave droz.


Hôtel de Ville.