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— Mais aussi tu m’interroges comme si tu avais fait pendant dix ans le métier de juge d’instruction…

— Eh bien, raconte-moi toute ta journée, ça m’amusera. Tu devrais bien penser ici à mes plaisirs ! Je m’ennuie assez quand tu me laisses là, seule, pendant des journées entières.

— Tu veux que je t’amuse en te racontant des affaires ?

— Autrefois tu me disais tout…

Ce petit reproche amical déguise une espèce de certitude que veut avoir Caroline touchant les choses graves dissimulées par Adolphe. Adolphe entreprend alors de raconter sa journée ; Caroline affecte une espèce de distraction assez bien jouée pour faire croire qu’elle n’écoute pas.

« Mais tu médisais tout à l’heure, s’écrie-t-elle au moment où notre Adolphe s’entortille, que tu as pris pour sept francs de cabriolets, et tu parles maintenant d’un fiacre ; il était sans doute à l’heure ? Tu as donc fait tes affaires en fiacre ? dit-elle d’un petit ton goguenard.

— Pourquoi les fiacres me seraient-ils interdits ? demande Adolphe en reprenant son récit.

— Tu n’es pas allé chez Mme  de Fischtaminel ? dit-elle au milieu d’une explication excessivement embrouillée où elle vous coupe insolemment la parole.

— Pourquoi y serais-je allé ?…

— Ça m’aurait fait plaisir, j’aurais voulu savoir si son salon est fini…

— Il l’est !

— Ah ! tu y es donc allé ?…

— Non, son tapissier me l’a dit.

— Tu connais son tapissier ?…

— Oui.

— Qui est-ce ?

— Braschon.

— Tu l’as donc rencontré, le tapissier ?…

— Oui.

— Mais tu m’as dit n’être allé qu’en voiture…

— Mais, mon enfant, pour prendre des voitures, on va les cherc…

— Bah ! tu l’auras trouvé dans le fiacre…

— Qui ?

— Mais, le salon — ou — Braschon ! Va, l’un comme l’autre est aussi probable.