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Le vieillard marmotta encore : puis tout à coup, et comme inspiré par une idée soudaine, il regarde Marc-Antoine ; et alors le marmottage d’aller, d’aller comme un flux intarissable.

Pendant ce temps, Juana laisse échapper quelques non de moins en moins formels ; puis elle jette un coup d’œil gracieux sur Riponneau, et baisse la tête et finit par se taire. La comédie était faite ; voici comment elle fut jouée.

Le monsieur s’éloigna en disant à Riponneau :

« Merci, monsieur, des soins que vous avez donnés à cette charmante enfant. Toute notre famille, qui prend intérêt à elle, vous saura gré de votre bonne action, et nous serions heureux de pouvoir vous récompenser, en venant au secours des chagrins de Juana. »

Sur cette parole, le vénérable vieillard les laissa ensemble.

Maintenant récapitulons. La pièce avait commencé un lundi ; passons au :

Mardi.

« O Juana ! dit Marc-Antoine, voulez-vous toujours mourir ?

— Je le voulais hier encore, car je ne croyais pas aux cœurs généreux et désintéressés.

— Et vous y croyez maintenant ?.

— Ne m’avez-vous pas sauvée sans me connaître ? »

Mercredi.

« Qu’est cela ? ce n’est rien, que de vous sauver la vie : le bonheur pour moi, ce serait de la consoler. »

Jeudi.

« Il n’y a de consolation, pour les cœurs brisés, que dans les douces affections, et je n’ai point d’amis.

— Je serai le vôtre.

— Je n’ai point de famille.

— Je vous en serai une. »

Vendredi.

« Après ce que j’ai fait pour un autre, vous devez me mépriser.

— Je vous admire et je vous vénère.

— Vous ne m’aimerez jamais.

— Je vous aime déjà comme un fou.