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Comme nous l’avons vu, Bison-des-Plaines et la Chouette s’étaient juré amitié, et seul le premier s’était constitué le défenseur de Fleur-du-mystère et le vengeur des ressentiments de la Chouette. C’est ainsi que la justice de Dieu se sert des hommes pour exécuter sa justice ici-bas.

Qu’est devenue Armande, durant les quinze années écoulées depuis son enlèvement ? Sa vie a été plus que pénible. À cette heure où nous sommes rendus, c’est une jeune fille d’à peu près seize ans, qui promet beaucoup. Elle est grande et bien faite ; ses cheveux sont longs et tombent toujours sur ses épaules un peu décharnées par une fièvre latente qui mine ses forces ; le soleil a mordu ses joues et y a mis une couleur brune assez accentuée ; ses grands yeux bleus frappent à première vue, tant ils renferment de chastes langueurs, tant ils expriment une douce aménité ; ses longs cils noirs qui les ombragent en diminuent leur éclat naturel et y jettent une ombre qui leur donnent plus de mélancolie. Sa taille, non comprimée par tous les artifices de ce siècle de fer, a crû rapidement comme les arbres de la forêt, cependant elle est grêle et semble avoir la flexibilité du roseau et la délicatesse du saule-pleureur. Son front a de l’ampleur et il est bien couronné d’une chevelure forte et noire ; la bouche un peu large, a une finesse de contour rare ; les dents, bien alignées ont une blancheur beaucoup plus éclatante que sa figure est brunie. D’un caractère rêveur, elle a la taciturnité du sauvage avec le-