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Comme le soleil allait disparaître sur les lèvres de l’horizon, le voile qui servait de porte au wigwam de Mélas se souleva, et un enfant de dix ans entra : Kouil ! Kouil ! dit-il en franchissant le seuil de la cabane.

Quel bel enfant pour un sauvage. Quel front développé, quels yeux avec reflet d’acier ! Les membres sont robustes comme ceux du bison, aussi l’appelle-t-on Bison-des-Plaines. Sa tête est bien posée sur ses épaules solides. On dirait un cèdre altier, couronné d’une épaisse chevelure. Il n’a que dix ans, mais dans la tribu on dit que son esprit a la sagesse des grands Sagamos, et sa poigne a la force des serres de l’aigle des montagnes.

— Tu as été presque une demi lune absent, frère, dit-il à Mélas qui ne répondait pas.

Cette visite l’importunait, et il ne le cachait pas.

Tiens, dit l’enfant, une petite visage-pâle ! Pauvre petite fleur, tu vas perdre tes couleurs au milieu de nous ! Tu as pris cela de l’autre côté du grand lac, frère ? Là bas où les terres semblent monter vers le ciel ; et il montrait la côte Sud.

Mélas resta coi. Bison-des-Plaines comprit, au regard de Mélas, que ce dernier n’aimait pas qu’on le questionna à ce sujet.

— Bison-des-Plaines gênait-il son frère le Hibou (c’était le nom que la tribu avait donné à Mélas à cause de la courbure de son nez et de ses yeux ronds) ?

— Le renard qui rôde autour du poulailler gêne toujours le maître, dit Mélas d’un air moqueur.

— Eh ! bien, avant de quitter ton wigwam, Bison-des-Plaines voudrait dire à son frère qu’il trouve drôle que le Hibou adopte les enfants de l’aigle, lui qui craint les visages-pales. Ne t’ai je pas vu fuir les