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jours, là où l’on peut la voir en passant à bord des chars, sur les razades d’en haut.[1]

Salut, croix sublime, Tu as sauvé le monde et le sauves encore, chaque jour, à ces heures désespérées où l’on n’a plus d’espoir qu’en Celui qui t’a portée généreusement ici-bas.

Reste là, battue des flots qui ne pourront que te briser un moment. Reste debout, au large, sur ce rocher désert, témoin du sauvetage de plus de deux cents personnes des Trois-Pistoles. Reste là comme un phare lumineux, rappelant à ceux qui viendront après nous, que la reconnaissance, qui t’a élevée sur cette pointe aride au sein du fleuve, demande que tu ne sois pas oubliée ni méconnue.

Qui sait, si, te regardant au loin, un pauvre malheureux n’aura pas une bonne pensée ?

Qui sait si ta vue ne consolera plus d’une infortune, plus d’un déshérité ici-bas ?

Oui, oui, reste debout, impassible, immuable et sereine, aux jours de tempête, comme à l’heure calme où la mer se fait pleine de caresses et de chansons.

Reste là comme une éternelle prière montant de la terre vers le ciel, non seulement pour toutes les gens des Trois-Pistoles, mais pour tous les malheureux de la mer qui vont on ne sait où, perdus entre deux abîmes : le ciel immense, l’immense mer.



  1. Il y a les razades d’en bas et celles d’en haut. Ce sont deux rochers arides à une demi lieue de la rive.