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CHAPITRE I

L’HERMITE DE SAINT-BARNABÉ


Nous allons maintenant pour un quart d’heure tout au plus, entrer dans le domaine de l’histoire, car l’hermite de St-Barnabé, a bel et bien existé et sa vie, intéressante sous bien des faces, est du domaine des faits réels, au moins en ce qui touche les trente-neuf années qu’il a vécues sur l’île, en face de Rimouski.

Rimouski ? — Il faudrait la plume de Buies, voire même celle de J. C. Taché pour nous en donner une idée juste, peindre les aspects majestueux qui l’entourent et développer à vos yeux cet imposant panorama qui se déroule depuis les monts neigeux en arrière, jusqu’aux Laurentides en face, qui, muraille immense, ferment l’horizon d’une ligne noire, sinueuse et accidentée. Ici une baie des plus régulières, ayant pour extrémités, le quai de Rimouski à droite et les ilets Canuel à gauche ; et au large, comme pour fermer l’entrée de cet estuaire à vastes dimensions, l’île St-Barnabé si connue des marins, s’étend sur une lieue de long. À marée basse il est facile de s’y rendre, du village, à pied sec, en passant sur les battures. Au fond de la baie, sur une légère éminence, c’est le village de Rimouski, aujourd’hui ville superbe, avec sa cathédrale, son collège classique et ses institutions de charité.

Or en 1728, un jeune homme d’environ vingt et un ans, arrivait dans la paroisse de Saint-Germain de Rimouski qui n’était alors qu’une simple mission desservie de temps en temps par le missionnaire de la côte sud. D’où venait-il, ce jeune homme robuste, humble et mélancolique, de manières parfaites, et d’un abord des plus faciles ? Qui était-il ? Quel projet avait-il en vue ? quel dessein arrêté le poussait vers ce coin de terre à moitié colonisé ? Victime de quelque malheur inconnu, de quelque drame caché, venait-il demander aux forêts encore vierges