Page:Gautier - Zigzags.djvu/38

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 35 —

resses ; les lunettes, les cuvettes, les casemates, les bastions, les contrescarpes et les demi-lunes me sont peu agréables : je suis comme Mascarille, j’aime mieux les lunes entières.

À quoi sert d’ailleurs une ville fortifiée, sinon à être prise ? — S’il n’y avait pas de villes fortifiées, il n’y aurait pas de siéges, et je ne vois pas ce qui empêche de passer à côté de ces forteresses si virginalement retranchées sous leurs jupons de murailles et leurs vertugadins de pierre.

Les villes fortifiées me semblent, à vrai dire, malgré leur air prude, de franches coquettes très-capables de laisser chiffonner au dieu Mars leurs collerettes de créneaux, et beaucoup plus promptes à dénouer leur ceinture de tours, pour entrer dans le lit du vainqueur, qu’on ne pourrait le croire d’après leur réputation sauvage et farouche. On y a ménagé aux ennemis toutes les facilités possibles pour y entrer avec agrément, par une infinité de petits chemins tout parsemés de roses, et entretenus très-soigneusement ; les talus et les glacis forment des pentes