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dans une écurie sans râtelier. Le râtelier est inutile : à quoi bon faire manger aujourd’hui ceux qui doivent mourir demain ? On en prit un maigre, efflanqué, décrépit, on le plaça sur une dalle, les yeux bandés par une courroie, et l’équarrisseur le frappa sur le front d’un marteau de fer assez petit, mais adapté à un long manche aussi de fer ; l’animal tomba sur le côté, d’une seule pièce, sans tressaillement, sans convulsions, sans la moindre agitation nerveuse qui trahit la souffrance : on ne l’avait pas tué, on lui avait escamoté la vie, et cela si prestement, si adroitement, qu’il ne s’en était pas aperçu ; ensuite on lui plongea un couteau dans la gorge, et le sang coula écarlate d’abord, puis violet, puis noir.

Cette galanterie terminée, l’équarisseur, homme de manières exquises, et qui ne serait déplacé dans aucun raout fashionable, nous pria gracieusement de passer dans le salon des chats : nous grimpâmes par un escalier calleux et bossué dans le salon de messieurs les chats ; il y avait plus de quatre cents peaux bourrées