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VOYAGE EN ESPAGNE.

romantiques, sans y rien apercevoir que des tas de masures et de décombres vaguement ébauchés dans l’obscurité. Nous traversâmes, sans nous y arrêter, Tolosa, où nous remarquâmes des maisons ornées de fresques et de gigantesques blasons sculptés en pierre : c’était jour de marché, et la place était couverte d’ânes, de mulets pittoresquement harnachés, et de paysans à mines singulières et farouches.

À force de monter et de descendre, de passer des torrents sur des ponts de pierre sèche, nous arrivâmes enfin à Vergara, lieu de la dînée, avec une satisfaction intime, car nous n’avions plus souvenir de la jicara de chocolate avalée, moitié en dormant, à l’auberge d’Astigarraga.




IV

Vergara. ― Vittoria ; le baile national et les Hercules français. ― Le passage de Pancorbo. ― Les ânes et les lévriers. ― Burgos. ― Une fonda espagnole. ― Les galériens en manteaux. ― La cathédrale. ― Le coffre du Cid.


À Vergara, qui est l’endroit où fut conclu le traité entre Espartero et Maroto, j’aperçus pour la première fois un prêtre espagnol. Son aspect me parut assez grotesque, quoique je n’aie, Dieu merci, aucune idée voltairienne à l’endroit du clergé ; mais la caricature du Basile de Beaumarchais me revint involontairement en mémoire. Figurez-vous une soutane noire, le manteau de même couleur, et pour couronner le tout, un immense, un prodigieux, un phénoménal, un hyperbolique et titanique chapeau, dont aucune épithète, pour boursouflée et gigantesque qu’elle soit, ne peut donner même une légère idée