Antonio-Maria Alvarez. Les capeadores ou chulos, coiffés du tricorne, embossés dans leurs manteaux de couleurs éclatantes, venaient ensuite ; les banderilleros, en costume de Figaro, suivaient de près. En queue de cortège s’avançaient, isolés dans leur majesté, les deux matadores, les épées, comme on dit en Espagne, Montès de Chiclana et José Parra de Madrid. Montès était avec son fidèle quadrille, chose très importante pour la sécurité de la course ; car, dans ces temps de dissensions politiques, il arrive souvent que les toreros christinos ne vont pas au secours des toreros carlistes en danger, et réciproquement. La procession se terminait significativement par l’attelage des mules destinées à enlever les taureaux et les chevaux morts.
La lutte allait commencer. L’alguazil, en costume bourgeois, qui devait porter au garçon de combat les clefs du toril, et montait fort maladroitement un cheval fougueux, fit précéder la tragédie d’une farce assez réjouissante : il perdit d’abord son chapeau, puis les étriers. Son pantalon sans sous-pieds lui remontait jusqu’aux genoux de la façon la plus grotesque ; et, la porte ayant été malicieusement ouverte au taureau avant qu’il eût eu le temps de se retirer de l’arène, sa frayeur, portée au comble, le rendit encore plus ridicule par les contorsions qu’il faisait sur sa bête. Cependant, il ne fut pas renversé, au grand désappointement de la canaille ; le taureau, ébloui par les torrents de lumière qui inondaient l’arène, ne l’aperçut pas tout d’abord et le laissa sortir sans coup de corne. Ce fut donc au milieu d’un éclat de rire immense, homérique, olympien, que la course commença ; mais le silence ne tarda pas à se rétablir, le taureau ayant fendu en deux le cheval du premier picador et désarçonné le second.
Nous n’avions de regards que pour Montès, dont le nom est populaire dans toutes les Espagnes, et dont les prouesses font le sujet de mille récits merveilleux. Montès est né à Chiclana, dans les environs de Cadix. C’est un homme