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VOYAGE EN ESPAGNE.

espagnoles sont d’un goût affreux qui rappelle le goût messidor et le goût pyramide. Les formes de l’Empire y fleurissent dans toute leur intégrité. Vous retrouvez là les pilastres d’acajou terminés par des têtes de sphinx en bronze vert, les baguettes de cuivre et les encadrements de guirlandes pompéi, qui depuis longtemps ont disparu de la face du monde civilisé ; pas un seul meuble de bois sculpté, pas une table incrustée en burgau, pas un cabinet de laque, rien ; l’ancienne Espagne a disparu complètement : il n’en reste que quelques tapis de Perse et quelques rideaux de damas. En revanche, il y a une abondance de chaises et de canapés de paille vraiment extraordinaire ; les murs sont barbouillés de fausses colonnes, de fausses corniches, ou badigeonnés d’une teinte de peinture à la détrempe. Sur les tables et les étagères sont disséminées de petites figurines de biscuit ou de porcelaine représentant des troubadours, Mathilde et Malek-Adel, et autres sujets également ingénieux, mais tombés en désuétude ; des caniches en verre filé, des flambeaux de plaqué garnis de leurs bougies, et cent autres magnificences trop longues à décrire, mais dont ce que je viens de dire doit paraître suffisant ; je n’ai pas le courage de parler des atroces gravures enluminées qui ont la prétention mal placée d’embellir les murailles.

Il y a peut-être quelques exceptions, mais en petit nombre. N’allez pas vous imaginer que les habitations des gens de la haute classe soient meublées avec plus de goût et de richesse. Ces descriptions, de l’exactitude la plus scrupuleuse, s’appliquent à des maisons de gens ayant voiture et huit ou dix domestiques. Les stores sont toujours baissés, les volets à moitié fermés, de sorte qu’il reste dans les appartements une espèce de tiers de jour auquel il faut s’accoutumer pour savoir discerner les objets, surtout lorsqu’on vient du dehors ; ceux qui sont dans la chambre voient parfaitement, mais ceux qui arrivent sont aveugles pour huit ou dix minutes, surtout lorsqu’une des piè-