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funèbres, des pedum, des tau, des globes allégoriques, des serpents enroulés, des balances où l’on pèse les âmes, — l’inconnu, la mort, le néant ! Pour toute végétation des stèles bariolées de caractères bizarres ; pour allées d’arbres, des avenues d’obélisques de granit ; pour sol, d’immenses pavés de granit dont chaque montagne ne peut fournir qu’une seule dalle ; pour ciel, des plafonds de granit : — l’éternité palpable, un amer perpétuel sarcasme contre la fragilité et la brièveté de la vie ! — des escaliers faits pour des enjambées de Titan, que le pied humain ne saurait franchir et qu’il faut monter avec des échelles ; des colonnes que cent bras ne pourraient entourer, des labyrinthes où l’on marcherait un an sans en trouver l’issue ! — le vertige de l’énormité, l’ivresse du gigantesque, l’effort désordonné de l’orgueil qui veut graver à tout prix son nom sur la surface du monde !

« Et puis, Charmion, je te le dis, j’ai une pensée qui me fait peur ; dans les autres contrées de la terre on brûle les cadavres, et leur cendre