nous savons qu’elle l’aima jusqu’à la mort. Le reste est à jamais effacé comme les travaux obscurs de tant de milliards d’êtres qui naquirent, qui souffrirent et qui moururent sur cette planète, comme les troubles de tant d’amantes qui, dans le cours infini des âges, servirent ou trahirent l’amour, sans laisser même, ainsi que la jeune fille de Pompéi, l’empreinte de leur sein dans la cendre.
Avant Antoine, il semble bien que cette femme intelligente, ambitieuse, vindicative et fière, ait été plus reine qu’amante. Grand constructeur, comme les Pharaons et comme les Ptolémées, elle couvrait Alexandrie de monuments magnifiques. Elle tint tête fermement aux intrigues des eunuques, aux séditions domestiques et populaires, et rentra par une ruse audacieuse dans sa ville et dans son palais, dont elle avait été chassée. Elle réussit à tenir en suspens les droits de Rome sur son empire, et s’il est vrai qu’elle y employa sa beauté et son charme, il faut songer que cette beauté n’était point incomparable, et que ce charme, dont César éprouva la puissance, n’eût pas suffi sans beaucoup d’intelligence et