On sait le mot profond de Pascal : « Le nez de Cléopâtre, s’il avait été plus court, toute la face de la terre aurait été changée. » Ce nez était démesuré, si l’on en croit les médailles, mais nous ne les en croirons pas. En vain, on nous mettra sous les yeux tous les médailliers de la Bibliothèque nationale, du British Museum et du Cabinet de Vienne. Nous dirons que c’est là comme une de ces illusions de féerie, où tous les nez s’allongent à la fois sur tous les portraits, et nous nous moquerons de la numismatique qui se moque de nous. Le visage qui fit oublier à César l’empire du monde n’était point gâté par un nez ridicule.
Il est certain que César aima Cléopâtre. Le divin Jules avait plus de cinquante ans. Il avait épuisé toute la gloire et tous les plaisirs et tiré de la vie tout ce qu’elle peut donner d’émotions violentes et de joies fortes. Son élégant visage avait pris la pâleur tranquille du marbre. Il semblait qu’un tel homme ne dût plus vivre que par l’intelligence. Pourtant, quoi qu’en dise M. Mommsen, il aima l’Égyptienne jusqu’à la folie. Car c’était une folie que de l’amener à Rome, et une plus grande folie que d’élever