Page:Gautier - Un trio de romans, Charpentier, 1888.djvu/311

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

traste de plusieurs laiderons vous a fait trouver gentille, vous serez obligé de me faire une cour dans les règles, de filer le parfait amour comme un héros de roman d’autrefois, et il n’est pas dit qu’au bout de toutes ces épreuves je ne vous rie au nez et ne vous fasse une belle révérence en vous disant : Votre servante. »



VIII


Un nouveau rigodon interrompit cette conversation à propos, et Justine, qui se tenait discrètement à l’écart et chaperonnait assez négligemment sa prétendue cousine, comprit bien vite, avec cette profonde entente du cœur humain en général, et de celui de leur maîtresse en particulier, qu’ont les femmes de chambre dignes de ce nom, que Mme de Champrosé s’intéressait à M. Jean d’une façon assez suivie, et n’était pas loin de voir son vœu exaucé.

Le bal tirait sa fin ; les ménétriers, fatigués de râcler, de souffler et de taper leurs instruments, tâchaient vainement de réveiller un reste d’ardeur en profitant des poses de la musique pour s’humecter le gosier ; le sommeil et l’ivresse les gagnaient ; les quinquets commençaient à manquer d’huile, et les bougies, arrivées à leur fin, menaçaient de faire éclater leurs bobèches.

L’Aurore, qui venait de quitter la couche du vieux Tithon, jetait à travers les rideaux ses tons de pastel bleuâtres.

Quelqu’un de bien avisé proposa, avant de rentrer se coucher, d’aller dans les prés Saint-Gervais voir le