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2 THÈATRE. ALIX. Pater noster, qui es in cœlis... BLANCHEFLOR. Je m’en vais te délacer et te coucher ; tu rèves tout debout. Après, je me déshabillerai moi-même et dormirai à mon tour. L’ANGE GARDIEN. La voilà presque nue; on dirait une des statues d’albâtre de la cathédrale, à la voir si blanche et si diaphane ; elle est si belle, que j’eu deviendrais amoureux, tout ange que je suis, si je continuais à la regarder plus longtemps. Ce n’est pas la première fois que les fils du ciel se sont épris des filles des hommes. Voilons nos yeux avec le bout de nos ailes. BLANCHEFLOR. Bonne nuit, Alix ! ALIX. Blancheflor, bonne nuit ! PREMIER ANGE GARDIEN. Elles dorment dans leur petit lit virginal comme deux abeilles au cœur d’une rose. Soufflons la lampe et. remontons là-haut faire notre rapport au Père éternel. SECOND ANGE GARDIEN. Frère, attends encore un peu ; n’as-tu pas remarqué comme la pauvre Alix avait ses beaux yeux tout rouges à force de travailler ? Je veux lui achever son pavot, afin qu’elle ne se fatigue plus la vue et que messire Yvon, le chapelain, " puisse mettre sa chape neuve à la grand’messe du jour de Pâques. PREMIER ANGE GARDIEN. Je le veux bien mais prends garde à te piquer les doigts avec l’aiguille.