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causerie affectueuse sous la clarté opaline de la lampe, ces purs plaisirs de la famille, auxquels la gravité de la situation ramène et qui valent mieux que les frivoles distractions du cercle, du jeu et des coulisses. Mademoiselle Agar a fait vibrer, avec une incomparable vigueur, la Lyre d’airain, d’Auguste Barbier, et mademoiselle Favart, vêtue d’une adorable robe blanche, satinée et duvetée comme un plumage de tourterelle, a roucoulé d’une voix plus douce que la plus suave musique, une poésie de M. Eugéne Manuel. Ce morceau charmant a pour titre les Pigeons de la République. Ce n’est plus à des messages d’amour que sont employés les oiseaux chers à Vénus. L’Amour ne cherche plus sous leur aile le petit billet plié et scellé d’un baiser de l’amante ; on leur demande des nouvelles de la France ; on les interroge sur la marche des armées ; leur vol est officiel, et ils sont enrôlés dans la grande guerre.

Nous avions lu, le matin même, les Guêpes d’Aristophane, et nous ne crûmes pas que notre conscience nous engageât à entendre l’acte des Plaideurs qui terminait le spectacle. Mais nous ne savions plus nous en aller, et il nous eût été