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doigt sa moustache. L’actrice, attentive et sérieuse, accomplissait dans la solitude son œuvre charitable.

Nous rendîmes aussi visite à la cuisine, placée au rez-de-chaussée. Quand les belles sociétaires de garde y descendent pour chercher un bouillon ou apprêter une portion de convalescent, la salle illuminée ressemble à cette toile célèbre de Murillo connue sous le nom de Cuisine des Anges.

En passant par le couloir qui mène de la salle à la scène, nous rencontrâmes deux religieuses, deux sœurs hospitalières, dont l’une demandait à l’autre : « Où donc est la sœur Sainte-Madeleine ? – Au théâtre du Palais-Royal, » répondit la sœur interrogée, du ton le plus naturel du monde.

Au moment même où passaient les sœurs, débouchait du foyer des acteurs Basile avec sa longue robe noire, son rabat blanc et ce bizarre chapeau que les prêtres espagnols portent encore. Il s’effaça contre le mur, saluant de la façon la plus respectueuse. On jouait un acte du Mariage de Figaro. C’était un pur hasard, vous le pensez bien. Mais n’accuserait-on pas d’invraisemblance un auteur qui risquerait un tel contraste ? Quelle