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assistaient au spectacle, et tous les yeux se tournaient de leur côté avec attendrissement. Il y avait là des bras en écharpe, des mains et des têtes entourées de linge ; mais celui qui fixait le plus l’attention était un jeune homme, la figure traversée par une large bandelette ; il avait l’air d’un de ces Touaregs du Sahara qui voilent leur figure jusqu’aux yeux comme des femmes. Dans l’aile de son nez s’était logée une balle qu’on n’avait pu, dit-on, encore extraire, ce qui ne l’empêchait pas d’être très-attentif aux larmes d’Andromaque et aux fureurs d’Hermione. Tous ces braves garçons, relevés à peine de leur lit de souffrance, semblaient heureux de cette distraction, et ceux qui avaient deux mains applaudissaient aux bons endroits avec cette naïveté de sentiment qui ne se trompe jamais.

Entre la tragédie et la comédie, on jouait aussi le Médecin malgré lui ce jour-là. – Coquelin a lu une poésie de M. Henri de Bornier, sur Châteaudun, l’héroïque petite ville, d’une fière tristesse et d’un beau souffle lyrique, qui a été accueillie avec le plus sympathique enthousiasme. Il a dit ensuite les Cuirassiers de Reichshoffen, de M. Bergeret. Il y a du mouvement, de la har-