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trajets, remplace l’omnibus avec avantage, et nous écoutions, tout en marchant, le babil d’un petit garçon de six ou sept ans accroché au jupon de sa mère et qui regardait les animaux dans leurs parcs. Il s’arrêtait à chaque étiquette, examinait la bête à travers le treillis et disait à la jeune femme : « Maman, est-ce que tu mangerais de ça, toi ? » et les yeux du petit carnivore brillaient de convoitise. La mère répondait : « Ce n’est pas fait pour être mangé ; ce sont des bêtes rares, précieuses et très-gentilles, il faudrait aller bien loin pour en avoir d’autres. » L’enfant se taisait ; mais devant le zèbre, le daim, le mouflon, l’orignal, il reposait opiniâtrement sa question : « Maman, est-ce que tu mangerais de ça, toi ? » Nous soupçonnons cet affreux moutard d’être le cousin de ce Fanfan Benoîton à qui l’on demandait : « Lequel aimes-tu mieux de papa ou de maman ? » et qui répondait : « J’aime mieux la viande. »