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pain de moins ! ne comprenez-vous pas, sagaces animaux, que notre ville est investie ?

Nous retrouvâmes dans leurs cabanes rustiques et leurs enclos treillagés, où l’hiver laissait encore quelque verdure, les lamas, les vigognes, les antilopes, les cerfs du Canada, les hémiones, les zèbres et tout le mobilier vivant du Jardin des Plantes au grand complet ; plus des phlascolomes et un singulier animal tenant du tapir et du sanglier que nous ne connaissions pas, amené d’Australie, le pays des cygnes noirs, de l’ornithorynque, de l’opossum, du kanguroo et autres excentricités zoologiques. Ce qu’on appelait autrefois « le palais des singes » était bien dépeuplé : babouins, mandrills, macaques, cynocéphales, cercopithèques, sapajous, papions, ouistitis avaient été décimés par le froid et beaucoup étaient morts de la poitrine. Les volières conservaient le plus grand nombre de leurs hôtes et ne semblaient pas s’inquiéter beaucoup du bruit lointain de la canonnade, auquel devaient bientôt succéder le sifflement et le fracas des obus.

Comme l’heure s’avançait, nous commençâmes à revenir sur nos pas par des allées différentes pour regagner le bateau-mouche qui, dans ces