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qu’on respire plus à l’aise que partout ailleurs.

Les bateaux à vapeur-omnibus montent et descendent avec une prestesse de dorades, se croisant en route, prenant et déposant des voyageurs aux débarcadères disposés sur le bord du fleuve, tantôt à droite, tantôt à gauche, suivant l’importance des quartiers. Qu’ils aillent ou retournent, ils sont toujours chargés. La cabine regorge, le pont est couvert, les banquettes n’offrent de place qu’aux points extrêmes de départ. La faible rémunération exigée (15 c.) contribue sans doute à cette vogue extraordinaire des bateaux-mouches, mais elle n’en est pas la cause unique. Cette course est comme une espèce de petit voyage, qui remplace les excursions qu’empêche la présence de l’ennemi. Elle donne une illusion de liberté, et l’on va au Point-du-Jour ou à Charenton comme on allait naguère faire son tour de lac.

C’est en effet une charmante promenade qui vous fait voir Paris sous un aspect auquel on n’est pas habitué ; et comme notre état de critique de théâtres nous laisse des loisirs, nous allons monter à la première station, et croyez, sur notre parole de touriste, que nous avons fait