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lorsque tout à coup un bruit de musique parvint à notre oreille. Nous nous approchâmes ; un cercle s’était formé près du café de la Rotonde et l’on se pressait autour de deux petites chanteuses italiennes.

L’une, la plus grande, fillette de douze ou treize ans, avec ses cheveux blonds, ses yeux bleus, ses traits réguliers et fins, son linge blanc plié sur la tête, ressemblait beaucoup à cette Pasqua-Maria illustrée par Bonnat et Jalabert. Elle portait ce tablier rayé transversalement de diverses couleurs qui a l’épaisseur d’un tapis, les manches de grosse toile, le jupon à plis droits ; mais comme le temps était assez froid, elle avait jeté sur ses petites épaules maigres quelque haillon parisien dû, sans doute, à la charité d’une âme compatissante ; malgré cette infraction à la couleur locale, elle n’en était pas moins jolie.

L’autre, qui semblait la cadette de la première, blonde aussi, avait à peu près le même costume, mais sa figure gardait un caractère plus enfantin. Son éducation musicale ne devait pas être aussi avancée que celle de sa sœur, car son rôle dans le concert se bornait à rhythmer le