Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/117

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’écorce en s’entr’ouvrant laissait voir un écrin de rubis ; à ces poires si parfaites qu’elles semblaient sculptées en albâtre de Florence pour être servies sur les tables de pierres dures des anciens grands-ducs de Toscane ; à cet ensemble charmant de formes et de couleurs, à ce savoureux bouquet pantagruélique arrangé avec un art si exquis !

L’autre soir il pleuvait, et le désir de nous abriter nous avait poussé sous les arcades du Palais-Royal. Une vieille habitude machinale ramena notre regard vers l’étalage de Chevet. O surprise ! à la place du célèbre magasin de comestibles, étincelait, avec l’éclat blessant d’un décor de féerie lamé de paillon, une splendide boutique de ferblantier. C’était toute une architecture de bottes en fer-blanc, rondes, carrées, oblongues, rangées avec symétrie comme les tuyaux basaltiques d’une grotte de Fingal, illuminées sur côté saillant d’une lueur métallique et faisant briller leurs étiquettes colorées d’un vernis d’or. Nous nous approchâmes. Hélas ! c’était bien la boutique de Chevet, mais il n’y avait plus de comestibles – de comestibles frais du moins. – En désespoir de cause, on faisait