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les maîtres chanteurs

Eva, délicieusement parée pour la fête, mais triste et le front pâli, entre en passant dans l’atelier de Sachs. Elle a pris pour prétexte son soulier qui la blesse, à ce qu’elle prétend, mais Sachs sait bien où le soulier la blesse, malgré les reproches qu’elle lui adresse de ne pas le deviner. Tandis qu’agenouillé devant elle, le cordonnier la tient prisonnière, un pied déchaussé, feignant de rectifier cette chaussure à laquelle elle trouve tous les défauts, Walther sort de la chambré et reste ébloui au sommet de l’escalier devant la jeune fille plus belle que jamais dans sa toilette de fiancée. Il improvise alors avec enthousiasme la dernière strophe de son chant.

Eva, toute palpitante de surprise et d’émotion, l’écoute en retenant son souffle.

— Eh bien, va-t-il enfin ce soulier ? dit Sachs d’une voix attendrie.

Eva comprend enfin que le bon cordonnier est son ami et son allié et elle se jette en pleurant dans ses bras.