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les morts subrepticement, presque en cachette, dans des espèces de tapissières noires, à des heures où les rues sont désertes et par des chemins détournés ; en quatre ou cinq voyages à Londres, nous n’avons pas rencontré un seul enterrement. On y tombe de la vie dans le néant sans transition, et vos restes inutiles sont escamotés et dissimulés avec la plus grande prestesse. Le catholicisme entend la mise en scène de la mort d’une façon supérieure, et la forte croyance à l’immortalité de l’âme diminue l’effroi de ces cérémonies funèbres.

On nous avait indiqué l’hôtel de New-York, lungo à l’Arno, près du pont alla Caraïa, comme suffisamment confortable. — En effet, nous trouvâmes une vaste maison tenue à peu près à l’anglaise, où l’on mangeait d’une façon civilisée, chose qui ne nous était pas arrivée depuis longtemps. Les voyageurs des autres nations ne sont pas assez reconnaissants envers les Anglais, ces grands éducateurs d’aubergistes, ces braves insulaires qui transportent partout leur patrie avec eux, dans des boîtes à compartiments, et qui, vivant aux contrées les plus extravagantes comme dans la Cité ou le West-End, ont, à force de guinées, de cris bizarres et de gloussements opiniâtres, établi par toute la terre le rumpsteak,