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réfractaires à l’art, non pas en dissimulant, comme on pourrait le croire, leur destination derrière un placage architectural plus ou moins heureux, mais, au contraire, en l’accusant avec netteté, en indiquant bien les organes principaux, et en les prenant pour thème d’ornement. Ainsi, dans l’usine, soignez les cheminées, pensez à la figure qu’elles font sur le ciel au-dessus de la ligne des combles ; dans un débarcadère, cherchez une belle courbe de voûte, une arcature qui, en satisfaisant aux lois de la statique, contente l’œil en même temps. Entre-croisez, compliquez les nervures, mais ne les cachez pas. Peignez-les, sculptez-les, semez-y de la dorure si vous voulez. L’ornement appliqué sur une partie vraie de l’édifice s’explique de lui-même et prend tout de suite du caractère. C’est ainsi que de besoins nouveaux surgira une architecture nouvelle, et non en mêlant, à tort et à travers, tous les styles et toutes les époques.

Les rues étaient sablées. Des inscriptions et des cartouches, des échafaudages et des balcons à louer annonçaient que la ville se préparait à recevoir de son mieux Leurs Majestés. Un arc de triomphe de fort bon style se dressait à l’entrée de la principale rue. À quelque distance, les charpentes et les toiles, sous la brosse d’ha-