Une immense clameur volait sur son passage,
Et cent mille canons lui chantaient dans l’orage
Leur fanfare d’airain.
Lui ne paraissait pas entendre ce tumulte,
Et, comme un Dieu de marbre, insensible à son culte,
Marchait silencieux ;
Quelquefois seulement, comme à la dérobée,
Pour retrouver au ciel son étoile tombée
Il relevait les yeux
Mais le ciel empourpré d’un reflet d’incendie,
N’avait pas une étoile, et la flamme agrandie
Montait, montait toujours.
Alors, plus pâle encor qu’aux jours de Sainte-Hélène,
Il refermait ses bras sur sa poitrine pleine
De gémissements sourds.
Quand il fut devant nous : Grand empereur, lui dis-je,
Ce mot mystérieux que mon destin m’oblige
A chercher ici-bas,
Ce mot perdu que Faust demandait à son livre,
Et don Juan à l’amour, pour mourir ou pour vivre,
Ne le sauriez-vous pas ?
O malheureux enfant ! dit l’ombre impériale,
Retourne-t’en là-haut, la bise est glaciale
Et je suis tout transi.
Tu ne trouverais pas, sur la route, d’auberge
Où réchauffer tes pieds, car la mort seule héberge
Ceux qui passent ici.
Regarde… C’en est fait. L’étoile est éclipsée,
Un sang noir pleut du flanc de mon aigle blessée
Au milieu de son vol.
Page:Gautier - Poésies complètes, tome 2, Charpentier, 1901.djvu/52
Cette page n’a pas encore été corrigée
![](http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/b/bb/Gautier_-_Po%C3%A9sies_compl%C3%A8tes%2C_tome_2%2C_Charpentier%2C_1901.djvu/page52-1024px-Gautier_-_Po%C3%A9sies_compl%C3%A8tes%2C_tome_2%2C_Charpentier%2C_1901.djvu.jpg)