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qu’on voit à Paris de jeunes élégants étudier la canne, le bâton et la savate, réduits en principes mathématiques par Lecour et Boucher.

Juancho tournait autour de son adversaire, avançant comme un bouclier son bras gauche défendu par plusieurs épaisseurs d’étoffe, le bras droit retiré en arrière pour donner plus de jet et de détente au coup ; tour à tour il se relevait et s’affaissait sur ses jarrets pliés, se grandissant comme un géant, se rapetissant comme un nain : mais la pointe de son couteau rencontrait toujours la cape roulée d’Andrès prêt à la parade.

Tantôt il faisait une brusque retraite, tantôt une attaque impétueuse ; il sautait à droite et à gauche, balançant sa lame comme un javelot, et faisait mine de la lancer.

Andrès, à plusieurs reprises, répondit à ces attaques par des ripostes si vives, si bien dirigées, que tout autre que Juancho n’eût pu les parer. C’était vraiment un beau combat et digne d’une galerie de spectateurs érudits ; mais par malheur toutes les fenêtres dormaient et la rue était complètement déserte. Académiciens de la plage de San-Lucar, du Potro de Cordoue, de l’Albaycin de Grenade et du barrio de Triana, que n’étiez-vous là pour juger ces beaux coups !

Les deux adversaires, tout vigoureux qu’ils étaient,