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boutons, de pantalons larges, d’une grande ceinture de soie et d’un manteau de couleur sombre. Tout cela était usé juste à point pour avoir perdu son lustre, mais ne manquait pas d’une certaine élégance.

Andrès, s’étant contemplé dans une grande glace de Venise à biseau, entourée d’un cadre magnifique et venue là on ne sait d’où, se trouva à son gré. En effet, il avait ainsi une tournure délibérée, svelte, faite pour charmer les cœurs sensibles de Lavapiès.

Après avoir payé et fait mettre les habits à part, il dit au marchand qu’il reviendrait le soir se costumer dans sa boutique, ne voulant pas qu’on le vît sortir de chez lui travesti.

En revenant, il passa par la rue del Povar ; il reconnut tout de suite la fenêtre entourée de blanc et la jarre suspendue dont Perico lui avait parlé ; mais rien ne semblait lui indiquer la présence de quelqu’un dans la chambre : un rideau de mousseline soigneusement fermé rendait la vitre opaque au dehors.

« Elle est sans doute sortie pour aller vaquer à quelque ouvrage ; elle ne rentrera que la journée finie, car elle doit être couturière, cigarera, brodeuse ou quelque chose approchant », se dit Andrès, et il continua sa route.

Militona n’était pas sortie, et, penchée sur la table,