Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/62

Cette page n’a pas encore été corrigée

ongles de chauve-souris, dans ces angles d’une blancheur éclatante ; aucune araignée ne tendait sa toile entre les solives du plafond ; tout était frais, souriant et clair dans cette pièce meublée de quatre murs. En Angleterre, c’eût été le dénuement le plus profond ; en Espagne, c’était presque l’aisance, et plus qu’il n’en fallait pour être aussi heureux qu’en paradis.

La vieille était enfin parvenue à se hisser jusqu’au bout de l’escalier ; elle entra dans le charmant réduit et s’affaissa sur une des deux chaises, que son poids fit craquer d’une manière alarmante.

« Je t’en prie, Militona, décroche-moi la jarre, que je boive un coup ; j’étouffe, j’étrangle ; la poussière de la place et ces damnées pastilles de menthe m’ont mis le feu au gosier.

— Il ne fallait pas les manger à poignées, tia », répondit la jeune fille avec un sourire en inclinant le vase sur les lèvres de la vieille.

Aldonza but trois ou quatre gorgées, passa le dos de sa main sur sa bouche et s’éventa en silence sur un rythme rapide.

« À propos de pastilles, dit-elle après un soupir, quels regards furieux lançait Juancho de notre côté ! je suis sûre qu’il a manqué le taureau parce que ce joli monsieur te parlait ; il est jaloux comme un tigre, ce Juancho, et, s’il a pu le retrouver, il lui