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elle y était regardée et suivie sur l’Alameda de plusieurs attentifs.

Aussi, c’est qu’elle était adorable avec sa mantille de dentelles blanches, sa rose dans les cheveux, son mouchoir de col assujetti aux épaulettes par deux camées, son corsage garni de passementeries et de franges aux poignets et aux entournures, sa jupe aux larges volants, ses bas à jour plus minces que des toiles d’araignées, enfermant une jambe faite au tour, ses jolis souliers de satin chaussant le pied le plus mignon du monde et dont on eût pu dire, comme dans la chanson espagnole : « Si la jambe est une réalité, le pied est une illusion. »

En changeant de fortune, Militona avait conservé son amour pour les modes et les usages espagnols ; elle ne s’était faite ni Française ni Anglaise, et, quoiqu’elle pût avoir des chapeaux aussi jaune soufre que qui que ce soit dans la Péninsule, elle n’abusait pas de cette facilité. Le costume que nous venons de décrire montre qu’elle s’inquiétait assez peu des modes de Paris.

Cette population vêtue de couleurs brillantes, car le noir n’a pas encore envahi tout à fait l’Andalousie, qui fourmillait sur la place ou s’attablait à l’auberge de Vista-Alegre et dans les cabarets voisins en attendant la course, formait un spectacle des plus gais et des plus animés.