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Au bout de cette allée, sur le pavé de laquelle le prodigue soleil de l’Andalousie pouvait à peine jeter quelques ducats d’or à travers le réseau serré des feuilles, s’élevait un petit bâtiment de forme élégante, une espèce de pavillon de ceux qu’on appelle à Grenade tocador ou mirador, et d’où l’on jouit d’une vue étendue et pittoresque.

L’intérieur du mirador était un bijou de ciselure moresque. La voûte, de celles que les Espagnols désignent sous le nom de media-naranja (demi-orange), offrait une si prodigieuse complication d’arabesques et d’ornements, qu’elle semblait plutôt un madrépore ou un gâteau d’abeilles que l’œuvre de la patience humaine ; les grottes à cristallisations offrent seules cette abondance de stalactites sculptés.

Au fond, dans le cadre de marbre de la fenêtre, qui s’ouvrait sur un abîme, étincelait le plus splendide tableau qu’il soit donné à l’œil humain de contempler.

Sur les premiers plans, à travers un bois de lauriers énormes, parmi des rochers de marbre et de porphyre, le Genil accourait, par sauts et par bonds, de la Sierra, et se dépêchait d’aller retrouver Grenade et le Darro ; plus loin s’étendait la riche Vega avec sa végétation opulente, et tout au fond, mais si près qu’il semblait qu’on pût les toucher, s’élevaient les montagnes de la Sierra-Nevada.