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capricieux, portaient, entremêlées à leurs volutes, des inscriptions en lettres arabes fleuries, où brillaient encore quelques restes de dorure.

Sur ces chapiteaux retombaient des arcs évidés en cœur, pareils à ceux de l’Alhambra, qui formaient sur les quatre faces de la cour une galerie couverte.

Au milieu, dans un bassin bordé de vases de fleurs et de caisses d’arbustes, grésillait un mince jet d’eau qui couvrait de perles les feuilles lustrées, et semblait chuchoter, de sa voix de cristal, quelque amoureux secret à l’oreille des myrtes et des lauriers-roses.

Un tendido de toile plafonnait la cour et en faisait comme un salon extérieur où régnaient une ombre transparente et une fraîcheur délicieuse.

Au mur était accrochée une guitare, et sur un canapé de crin traînait un large chapeau de paille, orné de rubans verts.

Tout homme, en passant par cette rue et en jetant l’œil dans cet intérieur, quelque mauvais observateur qu’il fût, n’eût pu manquer de dire : « Là vivent des gens heureux. » Le bonheur illumine les maisons et leur donne une physionomie que n’ont pas les autres. Les murailles savent sourire et pleurer ; elles s’amusent ou elles s’ennuient ; elles sont revêches ou hospitalières, selon le caractère de l’habitant